Blogue Axel Evigiran

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La dispersion est, dit-on, l'ennemi des choses bien faites. Et quoi ? Dans ce monde de la spécialisation extrême, de l'utilitaire et du mesurable à outrance y aurait-il quelque mal à se perdre dans les labyrinthes de l'esprit dilettante ?


A la vérité, rien n’est plus savoureux que de muser parmi les sables du farniente, sans autre esprit que la propension au butinage, la légèreté sans objet prédéterminé.

Broutilles essentielles. Ratages propices aux heures languides...


23 sept. 2017

Giacomo Leopardi, autour des Pensieri

Paon-du-jour, à l'automne 
Avec l’automne, les derniers papillons virevoltent enivrés de nectar sur les baies mauves ou rouges. Rodent les araignées… 

Le soleil est pale, souffreteux à l’instar du poète situé au-delà des lacs ; A Bologne, Naples ou Florence ; là ou est venu le visiter Stendhal. Le romantisme italique de Canti ne se dément pas… Son charme un peu désuet peut laisser perplexe. Je préfère sans conteste la brièveté plus incisive des Pensées. On raconte cependant que le grand œuvre de Giacomo Leopardi  est le Zibaldone, somme philosophique inachevée de plus de 2000 pages. C’est possible. On y trouve « Deux vérités que d'ordinaire les hommes n'admettent pas: l'une est qu'ils ne savent rien; l'autre qu'ils ne sont rien. Ajoutez-en une troisième, intimement liée à la précédente: qu'ils n'ont rien à espérer après la mort. »

Né à l’aube du XIXe siècle et trépassé sous l’ombre du Vésuve à moins de 40 ans, il devra sa postérité aux Chants, écrit entre l’automne 1816 et le printemps 1836. Athée parmi les dévots ; « le philosophe pessimiste était, de son vivant, moins connu que le poète nostalgique et surtout que le savant spécialiste de l’Antiquité et que l’observateur satiriste de la vie politique »[1].

« La première édition des Pensieri a été publiée de façon posthume dans l’édition des Opere en 1845. »[2]. 111 saillies d’un style ciselé, pour certaines frappées de noirceur lucide, pour d’autres teintés de cette incapacité à vivre par soi-même l’indicible : « L’ennui est l’apanage des gens d’esprit ».
En voici quelques-unes, choisies sans doute à l’emporte-pièce ; au grès de l’humeur du moment…

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Giacomo Leopardi

V
« Dans les choses profondes, c’est toujours le petit nombre qui est le plus perspicace ; la majorité, elle, ne s’entend qu’aux évidences… »

IX
« Si contre l’avis général tu as prédit avec succès l’issue d’un affaire, ne va pas croire que tes contradicteurs, devant la confirmation de tes dires, vont reconnaître la finesse et la portée supérieure de tes analyses : il nieront plutôt le fait ou la prédiction elle-même, allégueront que les circonstances ont changé et trouveront toujours quelque moyen et de persuader les autres que c’est eux qui avaient raison et toi qui avait tort »

XLV
« … les faibles  vivent suivant le bon plaisir du monde, et les forts, selon le leur »

LXXVI
« Il est au monde rien de plus rare qu’une personne que l’on peut supporter tous les jours »

LXXXVI
« Le moyen le plus sûr de cacher aux autres les limites de son savoir est de ne jamais les dépasser ».

CVIX
« L’homme est presque toujours aussi méchant qu’il lui est nécessaire ; et s’il se conduit bien c’est sans doute qu’il n’a pas besoin de recourir à la méchanceté. J’ai vu des gens armés d’une morale irréprochable commettre les actes les plus atroces pour échapper à quelque terrible danger qu’il leur était impossible d’éviter autrement ».

CX
« Il est curieux de voir combien l’excellence adopte fréquemment les manières simples, alors que les manières simples passent si souvent pour signe de médiocrité ».






[1] Chants, introduction par René de Ceccatty.
[2] Giacomo Leopardi, Pensée, éditions Allia.

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